L'article original s'intitule:
Encoding Odorant Identity by Spiking Packets of Rate-Invariant Neurons in Awake Mice (Olivier Geshwend, Jonathan Beroud, Alan Carleton)
Encodage de l'identité odorante par paquets de décharges de neurones à fréquence moyenne invariante chez les souris éveillées
La perception sensorielle est effectuée dans le cerveau par des processus de codage définis comme des modifications des formes de décharge dans des sous-populations particulières de neurones. Le code constitué par les fréquencesde décharge est le plus étudié car il implique des changements dans les décharges des neurones qui sont faciles à détecter et à quantifier expérimentalement. Cependant d'autres codes sont aussi à considérer puisqu'ils apportent une information complémentaire et/ou peuvent être plus résistants au bruit de fond du cerveau ou aux fluctuations du stimulus. Il s'agit notamment des codes temporels tels que les décharges synchronisées des neurones, du premier pic de latence qui suit le début du stimulus ou de la place des décharges dans des phases spécifiques de rythme particulier. Plusieurs codes peuvent être également combinés dans le but d'accroître la quantité d'information incluse dans les réponses neurales.
La réactivité des neurones est évaluée à un niveau cellulaire unique, généralement en se concentrant sur les variations de fréquence de décharge par rapport à une fréquence de base. Chez les mammifères, les cellules mitrales et à panache (cellules M/T : mitral and tufted cells ) dans le bulbe olfactif répondent à des odorants en montrant de grandes variations dans leur rythme de décharge. En outre la plupart des cellules M/T ne répondent qu'à quelques odorants seulement, ce qui mène à la conclusion qu'un codage « clairsemé » existe dans le bulbe olfactif. D'autre part, il a été montré que les cellules M/T subissaient de fines variations dans le calendrier de décharge selon les odorants tels que le réglage pour le premier pic de latence ou la phase privilégiée de décharge dans le cycle respiratoire.
Des études théoriques ont montré que des populations de neurones à rythme de décharge invariant pouvaient coder de l'information comme des assemblées de cellules dont les noyaux oscilleraient au même rythme. Mais si quelques études sur les rongeurs ont montré que les cellules M/T pouvaient coder l'information dans des laps de temps spécifiques, aucune n'a souligné que l'information pouvait être produitepar des cellules à rythme de décharge invariant qui changeraient leur chronologie de décharge. En outre, à notre connaissance, aucune expérience n'a tenté d'établir l'impact que pouvaient avoir des oscillations physiologiques telles que les oscillations gamma dans la conduite des activités des cellules M/T et dans la transmission de l'information odorante.
Pour répondre à ces questions nous avons enregistré l'activité électrique d'ensembles de cellules M/T chez des souris anesthésiées et chez des souris éveillées. En comparant l'activité correspondant à un odorant donné par rapport à l'activité de base, nous avons constaté que, au cours du cycle respiratoire complet, la plupart des neurones chez les animaux éveillés ont un rythme de décharge invariant. Mais, à côté de cela,nous avons découvert qu'ils existe de fins changements dans le calendrier des décharges à l'intérieur du cycle respiratoire qui contiennent suffisamment d'informations pour servir à discriminer les substances odorantes. Nous avons testé, à titre d'essai unique, la robustesse de différents codes à différentes échelles pour extraire l'information du stimulus d'une population neuronale. Nos résultats suggèrent que, pour atteindre une discrimination de l'odorant rapide et précise, l'information odorante est acheminée par des trains de potentiels d'action lus sur les oscillations gamma utilisées comme une horloge interne.
Préparation des animaux
Toutes les expériences ont été réalisées sur des souris mâles âgées de 8 à 16 semaines (élevées en France par Charles River) et elles sont conformes à la loi fédérale sur la protection des animaux ainsi qu'à l'ordonnance suisse sur cette même protection. Nos expériences ont été approuvées par l'université de Genève et par le comité d'éthique de l’État de Genève.
Pour les enregistrements sous anesthésie générale, les souris ont été préparées comme décrit précédemment (22). Pour les enregistrements à l'état d'éveil, les souris ont été anesthésiées à l'isoflurane (3 à 4 % pour l'induction, 1à 2 % pour la maintenance). La peau recouvrant le crâne a été enlevée sous anesthésie locale en utilisant le carbosterin ( AstraZeneca, Zug, Suisse ). Un casque métallique a ensuite été fixé sur l'os en scellant sa base à l'aide de ciment dentaire (Omni-Etch dentine. Omnident ). Le reste du crâne a également été recouvert de ciment dentaire à l'exception de la partie recouvrant le bulbe olfactif. Nous n'avons pas constaté de changement de comportement des souris dû à la fixation de ce casque après avoir replacé les souris dans leur cage. Les animaux continuaient à explorer, à se nettoyer, à présenter un niveau d'activité semblable à celui qu'ils manifestent dans les conditions normales. Ils ne présentaient aucun comportement témoignant d'un ressenti douloureux comme la posture voûtée, l'isolement par rapport au groupe ou des tremblements du corps.
Quelques jours après la remise des souris en cage, une souris a été placée dans un tube en plastique dont le dispositif de fermeture était vissé à un poste de commande métallique fixé sur une table à air. Les souris ont été entraînées à subir cette condition contraignante par deux à quatre sessions de 30 à 60 minutes chacune pendant deux jours. Le jour de l'expérience une souris est fixée par la tête et anesthésiée par l'isoflurane à l'aide d'un tuyau placé devant son museau. Une crânéotomie est ensuite pratiquée au-dessus de son bulbe olfactif. Après cette opération, des tétrodes sont placées à la surface du bulbe olfactif. L'intervention entière dure de 15 à 30 minutes. Ensuite nous faisons pénétrer les électrodes dans le bulbe pour rechercher les neurones M/T. Une fois que nous les avons trouvés, nous laissons les électrodes sur place et arrêtons l'anesthésie. Le protocole expérimental et les enregistrements débuteront de 45 à 60 minutes après que l'animal aura pleinement récupéré.
Pour toutes les expériences, la respiration a été contrôlée à l'aide d'un capteur de flux d'air directionnel placé devant le nez de la souris. Nous avons observé pour le cycle respiratoire une période moyenne de 393 millisecondes chez les animaux éveillés (15,8 ms d'écart d'un animal à l'autre S.D. n=6) et 352 ms chez les animaux anesthésiés (12,8 ms d'un animal à l'autre S.D. N=12). Le dispositif, bien que proche de la gueule, n'empêche pas l'odorant d'atteindre la narine de l'animal.
Délivrance de l'odeur et protocole expérimental
Toutes les substances odorantes ( acétate d'amyle : Aa, butyrate d'éthyle : Eb, hexanone : He) provenaient de Sigma-Aldrich. Comme stimuli olfactifs, on utilise les mélanges suivants :1- acétate d'amyle 60 %/air 40 %, 2-butyrate d'éthyle 60 %/air 40 %, 3- hexanone 60 %/air 40 %, 4-acétate d'amyle 60 %/butyrate d'éthyle 40 %, 5- acétate d'amyle 40 %/butyrate d'éthyle 60 %, 6-hexanone 60 %/butyrate d'éthyle 40 %, 7-hexanone 40 %/butyrate d'éthyle. Chaque stimulus a été répété 9 fois pour les souris anesthésiées et 5 fois pour les souris éveillées pour les ensembles de données. Pour tester l'impact du nombre de répétitions des stimulus (voir ci-dessous), nous avons établi un autre ensemble de données et utilisé 8 stimuli différents, chacun appliqué individuellement 20 fois. Tous sont des odorants monomoléculaires évoquant des perceptions différentes, au moins chez les humains : l'acétate d'amyle, le benzoate de méthyle, le butyrate d'éthyle, le géraniol, la canone(+), la canone (-), l'octanal, l'hexanone 3.
Quatre millilitres d'odorant monomoléculaire pur ont été placés dans des flacons de verre. Ces odorants ont été délivrés pendant deux secondes grâce à un olfactomètre fait sur mesure comme décrit précédemment (22) (57). La première bouffée d'odorant devait arriver lors de l'expiration de l'animal. Un flux d'air passait à travers les flacons contenant la substance odorante et était ensuite dilué 20 fois avec de l'air propre et sec avant d'être envoyé vers le nez. Tous les mélanges ont été réalisés au niveau gazeux et le débit relatif du flux variait de façon indépendante du courant d'air odorant. Comme les odeurs ont été délivrées à 1 cm du nez de l'animal, les taux de concentration étaient plus que suffisants pour atteindre la cavité nasale. Le débit total était constant : 0,4 litre par seconde. Pour maintenir une concentration d'odeur stable pendant toute l'application, on fait en sorte que les flux soient fixes au moins 5 secondes avant la délivrance de l'odeur.
Enregistrements électrophysiologiques in vivo et tri des potentiels d'action
Une fenêtre de 1 à 2 mm a été forée au-dessus du bulbe olfactif et la dure-mère a été ouverte. Une ou deux électrodes d'enregistrement à base de silicium (A-4x2-T-5nm-150—200-312 Technologie, MI,s Neuro Nexus, Ann Arbor, USA) ont été insérées. La boîte crânienne a été remplie d'un mélange de cire et de paraffine ou par un gel ophtalmique (Lacryviv, Alcon) pour protéger le cerveau du séchage. Durant les enregistrements sur les souris éveillées, un fil d'argent au contact du gel a été relié à la table d'air pour mettre à la terre l'ensemble de la préparation. Les électrodes ont été abaissées verticalement dans la zone cible jusqu'à ce que la couche des cellules MT médiales ou dorsales ait été atteinte. La couche de cellules MT a été clairement reconnue par sa forte activité de production de potentiels d'action extracellulaires tous à une profondeur de 100 à 150 mm (millième de millimètre). Cela contraste avec l'activité électrique beaucoup moins importante dans la plexiforme externe et la couche de cellules granulaires (39) (47) (58). A cet égard, il convient de noter que les électrodes que nous avons utilisées ont de faibles impédances (1 à 4 MQ à 1 kHz) . Les conditions pour l'identication optimale d'une cellule unique sont stables et permettent raisonnablement de saisir le potentiel d'action extracellulaire en tenant compte du bruit de fond (clustering, voir ci-dessous), conditions qui, dans le cas d'électrodes à faible impédance pourraient être remplies seulement chez les cellules MCs et T (cellules plus grandes que dans le Bulbe Olfactif) comme cela a été observé par d'autres chez les souris et les rats. Pour confirmer cela, on ne détecte pratiquement pas d'activité en cluster dans la couche de cellules granulaires qui contient une grande densité de petits neurones.
Les potentiels de champ à larges bandes ont été amplifiés d'un facteur 100 et filtrés par un passe-bande entre 0,1 et 9 kHz. Toutes les données ont été numérotées à 32556 Hz à l'aide du système Cheeta Digital Lynx. De plus amples détails sur les enregistrements et le tri des potentiels d'action ont été rapportés ailleurs (22).
Les neurones individuels ont finalement été identifiés comme les grappes présentant une période réfractaire dans leur propre autocorrélogramme. Un total de 102 neurones isolés ont été enregistrés chez les 12 souris anesthésiées et de 130 chez les souris éveillées. Le nombre de cellules enregistrées par animal variait entre 1 et 25. Pour les expériences testant la dépendance des codes au nombre de répétitions des stimuli odorants nous avons enregistré 46 neurones sur 6 souris. Toutes les données d'analyse et les statistiques suivantes ont été calculées à l'aide de scripts personnalisés écrits pour Matlab (The MathWorks,Inc,Natick, MA) ou C.
ANALYSE DES DONNEES
Réalignement des cycles respiratoires.
Les durées des cycles respiratoires chez les souris éveillées ont été très variables au sein d'un même essai ou d'un essai à l'autre. Afin d'analyser de façon cohérente les réponses des neurones aux odeurs d'un essai à l'autre, le début de chaque cycle respiratoire a été réaligné pour chaque essai. Tous les cycles respiratoire ont été artificiellement adaptés à la durée respiratoire moyenne (393 +ou – 15 millisecondes) au cours des 5 essais. Les cycles plus longs ont été coupés et les plus courts allongés.
Les périodes de décharge correspondantes ont été réalignées avec la même méthode. Il est important de noter que la chronologie relative des trains de potentiels d'action n'a pas été affectée par cette méthode.
Analyse statistique de la variation des fréquences de décharge pour les cellule individuelles.
Les variations de la fréquence de décharge par rapport au niveau de base pendant le cycle respiratoire moyen durant la présentation de l'odeur ont été évaluées par le test non paramétrique de Wilconson. Ce test donne la somme de ces variations dans chaque séquence du cycle respiratoire accompagnant la présentation de l'odeur et pour chacun des 7 stimuli. Dans un cycle donné une cellule était considérée comme sensible si au moins un stimulus de substance odorante provoquait une modification significative de la fréquence de décharge en comparaison avec la valeur initiale. Nous avons situé la valeur alpha à 0,05 et en outre appliqué une correction de Bonferroni pour les tests multiples (c'est à dire une division par le nombre de stimuli, soit 7) afin que le pourcentage ne puisse être surestimé de plus de 5 %.
Analyse de la mise au point dans la chronologie des potentiels d'action
Nous avons divisé chaque cycle respiratoire en 8 séquences (longues en moyenne de 43 millisecondes pour les souris anesthésiées et de 49 millisecondes pour les souris éveillées) et nous avons calculé la fréquence de décharge moyenne. Pour chaque odeur, nous avons décrit l'activité de décharge par essai au cours des cycles respiratoires consécutifs par une matrice de 8xn (n cycles respiratoires avant et pendant la présentation de l'odeur) Pour chaque odeur nous avons en outre fait la moyenne de toutes les matrices calculées à partir des essais individuels. Le même procédé a été appliqué aux sept odeurs et les matrices de moyennes ont été réunies ensemble (pour un ensemble total de 8x7n). Une analyse des composantes principales (ACP) a été calculée avec la matrice globale, ce qui a permis de représenter tous les cycles respiratoires par un vecteur dans un espace multidimensionnel à huit dimensions, chacune de ses dimensions représentant une des séquences du cycle respiratoire. Les trois premières dimensions de l'ACP présentaient plus de 75 % de la variation. Pour décider si les neurones réagissaient aux odeurs nous avons vérifié si la distribution des décharges dans le cycle respiratoire de base et dans le cycle pendant les périodes de stimulus odorants présentaient des différences. Pour cela nous avons mesuré dans l'espace de l'ACP les distances euclidiennes entre les périodes d'odeurs et les périodes de base dans le cycle respiratoire.
D'abord les cycles respiratoires ont été regroupés en cycles respiratoires de base (CRB) et cycles respiratoires d'odeurs évoquées (CRO). Les CRB ont de nouveau été divisés aléatoirement en deux groupes avec un nombre équivalent de cycles respiratoires : le CRB de contrôle CRBC et le CRB de test CRBT. Nous avons alors calculé le barycentre du CRBC puis la distance moyenne (d moyenne) et l'écart type (σ) de la distance euclidienne entre le barycentre du CRBC et chacun des CRB. Ensuite la distance (Ko ) entre chaque CROB et le barycentre du CRBC a été calculée. Une réponse a été considérée comme positive si Ko >d moyenne + λσ où λ=1.2.3....n pour au moins une odeur. Cependant cette méthode peut détecter des réponses faussement positives. Afin de les écarter nous avons calculé de la même manière les distances Kb entre les CRBT et le barycentre des CRBT. De la même façon, si une cellule est considérée comme sensible à au moins une odeur (pour λ=1.2.3...n), le nombre λ de l'écart type σ a été augmenté paramétriquement jusqu'à ce que pas plus de 5 % des cellules soient considérées comme sensibles en utilisant le modèle CBRC. Nous avons donc conservé la valeur de λ extraite de l'équation (2) et l'avons utilisée pour satisfaire aux conditions de l'équation (1). Cela a conduit à détecter les cellules sensibles avec un risque d'erreur inférieur ou égal à 5 %.
Les oscillations gamma ont également été utilisées pour servir de cadrage aux séquences de l'activité de décharge et pour construire un ensemble de vecteurs. Dans ce cas chaque fréquence de décharge d'une cellule MT a été encadrée temporellement avec les cycles d'oscillations enregistrées sur la même tétrode. Les cycles gamma ont été ensuite réalignés à la période moyenne d'oscillation (19 ms + ou – 2 ms) sur toutes les tétrodes. Le réalignement a été identique à celui qui a été utilisé pour les cycles respiratoires.
Pour apprécier la réussite de cette classification, un essai par stimulus a été choisi comme test de base et on a fait la moyenne des essais suivants pour établir les réponses type. Les distances euclidiennes entre les diagrammes liés à chaque essai et les diagrammes liés aux divers stimuli ont été calculées, et les diagrammes liés à l'essai ont été établis en se fondant sur le modèle le plus proche (c'est à dire à celui correspondant à la prédiction du stimulus). Le pourcentage de réussite pour caractériser l'identité et l'intensité de l'odeur était la fraction d'attributions correctes par rapport au nombre total d'attributions.. Nous avons calculé ce pourcentage pour toutes les odeurs. En résumé l'algorithme crée des vecteurs modèles pour chaque stimulus basé sur une fraction de la répétition des stimulations et alors conforme le résultat de chaque essai suivant à ce vecteur modèle (en mesurant la distance euclidienne).
Brassage de la structure de vecteur
Nous avons mélangé aléatoirement la cellule de référence et l'odeur pour chaque séquence de décharge au cours des cycles respiratoires et pour chaque essai.
Construction du vecteur cumulatif concaténé.
La fréquence cumulée a été calculée en additionnant les vecteurs de chaque séquence consécutive dans le premier cycle respiratoire après l'apparition de l'odeur. A la fin de la période étudiée (c'est à dire le cycle respiratoire complet), le vecteur cumulatif contient les fréquences additionnées de toutes les séquences consécutives formant le cycle respiratoire. Le code concaténé consiste à concaténer chaque vecteur successif aux précédents ( à titre d'exemple, pour une séquence i la dimension du vecteur est i multipliée par le nombre de neurones dans la population). Ce vecteur garde ainsi l'historique des activités pendant toutes les séquences après l'apparition de l'odeur.
Afin d'établir un ensemble de données pour les souris éveillées (non anesthésiées), nous avons utilisé cinq essais par stimulus. Nous avons cherché à savoir si la différence des performances observées entre le code cumulatif et le code concaténé pouvait être lié à un sous-échantillonnage, en particulier dans le cas d'une séquence de temps très courte. Nous avons alors établi un second ensemble de données en utilisant 20 essais par stimulus odorant. Nous avons calculé où se situait la prévision maximale pour le premier cycle après la réception de l'odeur en faisant varier le nombre d'essais de 3 à 20 et en utilisant différentes longueurs de séquences (intervalles) pour calculer le vecteur de population. Nous avons observé que la performance de prédiction des deux codes évoluait de façon similaire pour différents nombres d'essais indépendamment de la séquence observée. Ceci exclut que la différence de performance des deux codes soit due à un sous-échantillonnage.
RESULTATS
Pour les cellules mitrales enregistrées chez les souris éveillées, les odorants conduisent à une faible variation de la fréquence de décharge.
Afin d'étudier les mécanismes potentiels de codage dans les cellules M/T qui sous-tendent la représentation des odeurs, nous avons enregistré des ensembles de neurones dans le bulbe olfactif de la souris à la fois chez les sujets anesthésiés et chez les sujets éveillés (non anesthésiés). La fréquence de base moyenne pour les décharges de neurones enregistrés était de 15,4 + ou – 14,3 (moyenne + ou – écart type) pour les animaux anesthésiés et de 14,2 + ou – 14,6 pour les animaux éveillés (pas de différence entre les distributions de Kolmogorov-Smirnov, P>0,5). Chez les souris anesthésiées, les odorants entraînaient des réponses claires pour certains neurones (environ 40 % des cellules. Voir ci-dessous ) ainsi qu'il est montré dans l'histogramme du temps correspondant au stimulus (PSTH) pendant la durée d'un cycle respiratoire. Nous avons observé une augmentation ou une diminution de la fréquence de décharge après le début de la présentation de l'odeur (voir exemples représentatifs). En revanche chez les souris éveillées, le même ensemble de stimuli a entraîné des changements faibles ou inexistants de la fréquence de décharge. Nous avons donc déterminé si les neurones enregistrés avaient répondu aux substances odorantes. Pour cela nous avons mesuré à chaque cycle respiratoire le pourcentage de cellules qui ont modifié grandement leur fréquence de décharge pour au moins un sur sept des odorants testés (voir Méthode). Pour les souris anesthésiées, une large fraction des cellules M/T (environ 40 % pour 102 neurones testés) répondaient de façon significative à au moins un odorant(Fig 2E). En revanche, pour les souris éveillées, le pourcentage des souris qui répondaient a été inchangé pendant l'application de l'odorant (figure 2F ; 1,92 % + ou – 0,44 S.D. pour les périodes de référence Et 1,69 % + ou - 0,64 pour les périodes d'exposition à l'odeur ; n=130 neurones). ) . Ainsi les neurones M/T enregistrés chez les souris éveillées répondent beaucoup moins aux odorants par un changement de fréquence.
Il s'ensuit que chez les souris éveillées, soit une fraction importante des cellules M/T ne sont pas activées par les odorants et n'apportent pas d'informations sur le stimulus, soit les cellules répondent et encodent le stimulus sans changer fortement leur fréquence de décharge (c'est à dire que les changements de la fréquence liés à l'odeur par rapport à la fréquence de base calculés sur un cycle respiratoire ne sont pas significatifs : Fig 2F). Nous avons exploré la capacité des ensembles neuronaux à coder l'information sensorielle. L'activité d'ensemble a été quantifiée en utilisant la représentation d'un vecteur de population, méthode (décrite ci-dessous) déjà utilisée avec succès pour l'analyse du codage (22),(32),(33),(34),(35).Pour chaque neurone, sa fréquence de décharge a été calculée pendant une séquence spécifique et a été représentée par un vecteur individuel. Chaque cycle respiratoire a été divisé en 8 séquences de durée équivalente (50 ms pour les souris anesthésiées, 40 ms pour les éveillées).L'évolution temporelle de l'ensemble des décharges pour chaque essai d'odeur est ainsi décrite par une série chronologique de vecteurs. Afin de tester les capacités de codage réelles de l'activité de la population de neurones nous avons utilisé, à titre d'essai de base unique, un algorithme de classification basé sur la similarité des vecteurs de population (voir Méthodes). Pour les souris anesthésiées, la courbe prédictive correcte fluctuait entre à peu près 30 et 60 % à la fois à l'intérieur de chaque cycle respiratoire et d'un cycle à l'autre (fig 2G, premier cycle max 52 % et, en moyenne, 37 + ou – 10 % S.D.). Ces valeurs sont beaucoup plus importantes que celles dues au hasard (14%), confirmant que l'activité de la population pouvait être utilisée pour décoder l'information du stimulus (pour un seul essai). Chez les souris éveillées la prédiction correcte était étonamment différente (voir Fig 2F) de celle due au hasard et même supérieure aux valeurs obtenues chez les animaux anesthésiés (fig 2H,premier cycle max 77 % et la moyenne 54+ ou – 17 % S.D.). En résumé une grande partie des cellules M/T chez les animaux éveillés répondent aux odorants et apportent assez d'informations sur l'identité du stimulus pour le discriminer ensemble alors qu'elles ont une fréquence de décharge invariante en moyenne pendant le cycle respiratoire.
Chez les souris éveillées , les odorants modulent la place du potentiel d'action dans le cycle respiratoire.
Pour coder l'information du stimulus tout en gardant une fréquence de décharge constante, les neurones individuels doivent apporter de l'information en ajustant la place du potentiel d'action (pic d'activation) à l'intérieur du cycle respiratoire. Il s'ensuit donc que c'est à la condition que le réseau bulbaire contienne assez de neurones MT entrant ensemble en activité qu'une telle information peut être lue par les centres supérieurs du cerveau. Afin de mieux détecter les changements d'activité selon l'odeur évoquée, nous avons quantifié le nombre de cellules sensibles à l'odorant qui contribuent au code de la population en utilisant une méthode qui ne prend pas seulement en compte la fréquence de décharge mais aussi la redistribution des moments des trains de potentiels d'action dans le cycle respiratoire. Nous avons divisé chaque cycle respiratoire en 8 séquences d'une durée égale de 40 à 50 ms. Ce procédé permet la représentation dans le temps des séries de réactions moyennes aux odeurs par un vecteur temps à huit dimensions (c'est à dire pour une séquence consécutive de CR). Pour chaque neurone nous avons ensuite calculé un composant d'analyse principal (CAP) sur toutes les moyennes d'essais d'odeurs (voir méthode). Dans l'espace des CAP les activités de base et celles liées à la population de neurones activés par l'odeur évoquée apparaissent comme des points représentant chaque CR.
Pour trouver des changements significatifs dans les schémas d'activation après l'application de l'odeur, il faut tenir compte de la variation stochastique des potentiels d'action pour chaque neurone. Pour déterminer lesquelles des réponses à l'odorant sont significativement différentes des valeurs initiales, nous avons utilisé pour déterminer la moyenne de chaque essai un cadre tenant compte des fluctuations de la référence (voir méthode et figure 1). Pour les cellules enregistrées chez les animaux anesthésiés, l'activité pendant le cycle respiratoire correspondait à l'activité de base (c'est à dire que les points colorés étaient à l'extérieur du nuage noir), résultat tout à fait cohérent avec les grands changements de fréquence liés à l'exposition à l'odeur. En revanche, chez les souris éveillées, l'ensemble des points (c'est à dire pour la période de base et pour la période d'exposition à l'odeur) est plus compact que pendant la période d'exposition à l'odeur seule. Certaines séquences du cycle respiratoire sont clairement dans l'espace situé à l'extérieur du nuage de base, ce qui est compatible avec l'idée que les neurones ont répondu à ces substances odorantes. Pour identifier ces neurones sensibles nous avons déterminé les cycles respiratoire au cours de la période d'application de l'odeur qui étaient suffisamment éloignés de l'activité de base pour être considérés comme différents et alors affectés par l'odeur. Pour estimer le nombre de neurones donnant de fausses réponses positives, nous avons également effectué l'analyse sur plusieurs périodes de base. Nous avons fixé un seuil de déviation standard à partir duquel nous ne détectons pas plus de 5 % de réponses faussement positives par rapport à la période de base (fig.1 et 3 C-D). Après quantification, 64 % des cellules MT chez les souris anesthésiées et 29 % chez les animaux éveillés sont apparues sensibles à au moins un odorant. Nous concluons que quelques neurones enregistrés chez les souris éveillées répondent aux odorants en modifiant leur fréquence de décharge à l'intérieur du cycle respiratoire.
Efficacité de l'information de codage de l'odeur pour la population de cellules MT à fréquence de décharge invariante.
Nous nous sommes ensuite posé la question de savoir si toute la population de cellules est impliquée dans le codage de l'information sur le stimulus. Pour répondre à cette question, nous avons construit un vecteur de population pour un intervalle de temps correspondant à la période d'oscillation gamma (16 ms, 60 Hz) que nous avons utilisé pour calculer la courbe correcte de prédiction du stimulus. De telles oscillations sont provoquées par les odeurs dans le bulbe olfactif (voir 6 D) et ont été envisagées comme une manifestation du traitement sensoriel. Chez les animaux anesthésiés comme chez les animaux éveillés, les valeurs prédites étaient largement au-dessus de celles dues au hasard. En outre le niveau maximal de prédiction décroissait dans cette courte fenêtre de temps quand on le comparait aux intervalles de temps plus longs présentés auparavant (comparer les Fig. 2 G-H et 4 A-B). L'activité de décharge de la population est donc suffisamment précise pour coder l'identité de l'odeur à 60 Hz.
Nous avons ensuite calculé la courbe de prédiction correcte en utilisant une population de 37 des 102 neurones enregistrés chez les animaux anesthésiés en excluant les neurones sensibles (identifiés dans la Fig 3). Comme prévu les performances ont décru pour rejoindre le niveau du hasard. Chez les animaux éveillés en revanche, après avoir enlevé les cellules sensibles, les performances sont restées au-dessus du niveau du hasard (Fig. 4 D, maximum=45 %, n=92 cellules restant dans la population). Pour éliminer la possibilité que ce résultat soit dû à la différence de cellules utilisées dans les assemblées de cellules, nous avons choisi au hasard le même nombre de cellules dans la population des animaux éveillés et dans celle des animaux anesthésiés (soit n=37) et nous avons classé les résultats pour ce sous-ensemble de cellules. Nous avons effectué ce processus de choix aléatoire 10 fois afin de collecter à chaque fois un sous-ensemble différent de cellules (Fig ; 4E). La courbe de prédiction moyenne est restée encore nettement au-dessus du hasard (fig ; 4E, max 40+ ou – 6%). Ces résultats mettent en évidence que les cellules qui sont habituellement négligées en raison de leur faible variation de fréquence de décharge et sont considérées comme non sensibles peuvent encore contribuer au code neural comme le révèle l'analyse de la population.
Chez les souris éveillées, les cellules à fréquence de décharge invariante contiennent assez d'informations pour coder autant les caractéristiques d'une odeur que les assemblées de cellules. Les schémas de décharge pour l'ensemble de la population trouvés à chaque essai sont suffisamment caractéristiques pour prédire l'identité du stimulus. Par conséquent chaque cellule peut être précisément programmée pour s'activer dans le temps (au moins pendant un intervalle de 16 ms) pour aboutir à un schéma d'ensemble de réactions propre à l'odeur évoquée. Pour vérifier l'importance de la synchronisation des décharges , nous avons changé à l'intérieur du cycle respiratoire le schéma de fréquence des potentiels d'action pour tous les neurones enregistrés. Pour cela nous avons mélangé aléatoirement les intervalles de 16 ms à l'intérieur de chaque cycle respiratoire pour chaque essai, tant au niveau de l'odeur évoquée que de la cellule enregistrée. Avec un tel brassage de population la capacité de prédire l'identité du stimulus a disparu (les performances relevées sont maintenant au niveau du hasard).
Prises ensemble, ces données indiquent que le moment précis de la décharge dans la population neuronale est essentiel pour encoder avec précision l'identité de l'odorant.
Impact de la durée de la fenêtre de temps pour les différents mécanismes de décodage.
Les conclusions précédentes ont souligné l'importance de l'information temporelle pour encoder l'identité de l'odorant par les différentes assemblées de cellules. Cependant pour comprendre l'échelle de temps à laquelle l'activité de la population est la mieux prédictive et pour évaluer des types de codage (par exemple fréquence cumulée ou modulation temporelle) nous avons fait l'analyse suivante en variant la durée de la fenêtre de lecture. Puisque les animaux sont capables de prendre une décision sur l'identité de l'odorant en une seule inspiration ( environ 200ms, (41),(42),(43),(44),(45),(46)), nous avons effectué l'analyse sur le premier cycle de respiration et nous avons fait varier paramétriquement la durée de la fenêtre d'analyse. Nous avons calculé la courbe de prédiction du stimulus, soit dans un intervalle de temps individuel (instantané), soit en additionnant (cumulatif), soit en concaténant (concaténé) les intervalles au fil du temps. La lecture instantanée serait semblable à la lecture d'une capture d'écran dans laquelle chaque point apporte une information indépendante. En revanche la lecture de l'information à travers le temps prend en compte l'histoire passée. Nous avons considéré deux modèles : un premier présentant l'accumulation des potentiels d'action dans le temps (fréquence cumulée) et un second développant l'information contenue dans la séquence d'activité ( c'est à dire ses caractéristiques temporelles) en effectuant la concaténation de chaque population de vecteurs selon les intervalles de temps successifs. Le dernier modèle présente l'information contenue dans les menus détails de l’activité temporelle et qui serait perdue si on ne prenait en compte que la moyenne des vecteurs. Dans les intervalles de temps individuels (lecture instantanée), la prédiction correcte de l'odeur croît lorsqu'on élargit la durée de la fenêtre de temps en atteignant un maximum d'environ 80 % pour des intervalles de temps de 100 ms et ensuite elle décroît (fig 5A – B). Pour les fenêtres de temps inférieures à 50 ms, la prédiction décroît jusqu'à atteindre une valeur comparable à la valeur initiale à des échelles de temps proche de la pointe de synchronisation (3 et 5 ms) (fig 5b). En revanche lorsque l'histoire évolutive de l'activité de décharge au cours du temps est prise en compte (cumulative ou concaténée) l'information peut être extraite à ces échelles de temps et atteindre jusqu'à 80 % de valeur prédictive (fig 5A.B). Nous avons observé cependant une différence notable entre entre la fréquence cumulée et les codes concaténés. La prédiction maximale atteinte dans le cycle de respiration pour l'analyse des fréquences reste stable pour tous les intervalles de temps de courte durée (fig.5A, panneau supérieur gauche et fig.5B). Il est intéressant de noter que pour les intervalles de temps inférieurs à 10 millisecondes la prédiction décroit et devient même inférieure à celle qu'elle est avec le code formé par la fréquence cumulée. Par conséquent au cours du cycle respiratoire la prédiction maximale du code produit par la fréquence cumulée est plus résistante à la présence du bruit très fluctuant à une échelle de temps réduite mais est moins prédictive que le code concaténé à des échelles de temps plus longues que 100 millisecondes
De plus la courbe de prédiction évolue différemment durant le cycle respiratoire pour chacun des codes, un paramètre qui pourrait avoir de l'importance pour le comportement de l'animal lorsque l'on considère le compromis entre la vitesse observée et la précision dans la discrimination des odeurs. Le modèle concaténé atteint plus rapidement la prédiction maximale pour des fenêtres spécifiques (par exemple 12 ms ; fig 5A, panneau supérieur droit) que ne le fait le modèle cumulatif. Nous avons d'ailleurs quantifié cette différence de performance en représentant la distance entre les deux courbes de prévision des deux codes différents pour différents intervalles de temps. Nous avons effectué cette analyse pour trois parties du cycle respiratoire (à partir de l'apparition de l'odeur, soit 100 ms, à 200 ms et à la fin du cycle respiratoire). Dans tous les cas, le code pour la fréquence cumulée était un meilleur prédicteur à des échelles proches du moment de la fréquence maximum mais il devenait moins efficace pour des fenêtres de temps de 6 à 50 millisecondes. Nous avons également observé que le pourcentage de prédiction augmentait lorsqu'on considérait les parties antérieures du cycle respiratoire, ce qui reflète que la prédiction due au au code concaténé atteint ses performances les plus grandes directement après l'apparition de l'odeur. A des échelles de temps réduites (inférieures à 6 millisecondes) , la fréquence cumulée est meilleure pour coder les informations sur l'odorant alors que le code concaténé atteint plus rapidement des valeurs élevées de prédiction pour la lecture de fenêtres comprises entre 6 et 50 millisecondes. Pour parvenir à un compromis entre la précision et la rapidité de la discrimination, ces résultats mettent en évidence l'existence d'une fenêtre de temps de lecture optimale d'une durée de 10 à 60 ms dans laquelle l'activité de décharge peut être analysée. Nous nous sommes alors interrogés sur la nature d'une horloge interne qui pourrait être utilisée pour découper les séquences de potentiels d'action et maximiser la lecture de l'information sensorielle.
Il est intéressant de constater que la fenêtre temporelle optimale pour la discrimination d'une substance odorante dans le bulbe olfactif est analogue à la durée d'un cycle unique de l'oscillation gamma. Ainsi l'oscillation gamma pourrait être utilisée comme une horloge interne afin de découper et transmettre les variations de fréquence particulières des potentiels d'action émis par les cellules MT. Pour vérifier cette hypothèse, nous avons détecté les cycles gamma de nos enregistrements (fig 6A) et nous avons calculé les vecteurs de population en utilisant comme référence la durée des oscillations gamma. Sur l'ensemble des essais, les cycles gamma ont été réalignés les uns avec les autres de façon similaire à l'alignement des cycles respiratoires (voir méthode), la durée moyenne d'un cycle gamma étant de 19 ms +ou – 2 (moyenne + ou – écart type). En outre nous avons utilisé différentes parties des oscillations gamma comme points de départ pour générer des vecteurs de population différents : la période de pic à pic, le premier point d'inflexion, la période de creux à creux et le second point d'inflexion (fig 6 B). Quelle que soit la façon dont l'information ait été morcelée, nous avons observé de hautes performances de prédiction à la fois pour le code concaténé et pour le code cumulatif. Cela confirme que l'oscillation gamma pourrait agir comme un cadre qui permettrait de convoyer assez d'informations pour discriminer les différents stimuli. En outre le choix de la référence de temps est important car il peut permettre de recueillir le maximum d'informations pour le code considéré. En effet nous avons observé que ce code est très sensible à la phase gamma choisie pour calculer le vecteur de population. La partie du cycle gamma qui est la plus informative commence avec la phase ascendante d'une oscillation gamma. Ces résultats suggèrent que l'information sur l'identité odorante peut être découpée par des cycles d'oscillations gamma dont chacun peut agir en tant que structure d'encadrage des trains de potentiels d'action.
En conclusion ces données suggèrent que l'information sur l'odorant issue de l'activité de la population est lue comme des paquets de potentiels d'action (c'est à dire des blocs temporels) d'une durée déterminée pour obtenir un compromis optimal entre la rapidité et la précision de l'identification.
DISCUSSION
Dans cette étude nous avons analysé comment l'information sur l'odorant est traitée dans la population de cellules MT. Contrairement aux animaux anesthésiés où les changements de fréquence sont prédominants, nous avons montré qu'une fraction importante des cellules M/T du bulbe olfactif sont des cellules à fréquence moyenne invariante pendant le cycle respiratoire et qu'elles répondent aux odorants chez les souris éveillées principalement en modifiant le calendrier de leurs décharges en se conformant au cycle respiratoire.Nous avons montré que ces neurones à fréquence moyenne invariante transmettent l'information sensorielle comme une population de cellules co-activées dans des intervalles de temps différents. Chez les animaux éveillés l'information sensorielle peut être décodée sous forme de séquences de paquets de potentiels d'action par le réseau en aval afin de parvenir à un compromis entre la rapidité et la précision de la reconnaissance de l'odeur. Nous proposons que les oscillations gamma du bulbe olfactif agissent comme une horloge interne pour encadrer les séquences de paquets de potentiels d'action.
La sensibilité aux odorants des cellules MT chez les souris éveillées.
De nombreuses études chez les souris anesthésiées montrent qu'un grand pourcentage de cellules MT ont répondu aux odorants par des changements dans leur fréquence de décharge. Chez les animaux éveillés nous avons confirmé à un niveau plus étendu de population une réduction globale de la fréquence de décharge liée à la réponse à l'odorant. Dans cet ensemble de données aucune cellule MT n'a montré un changement significatif de fréquence lié à l'évocation de l'odorant. Mais les cellules répondent aux odorants en redistribuant leurs potentiels d'action à l'intérieur du cycle, comme nous venons de le décrire pour certains neurones (32) (48)
Pourquoi n'a-t-on pas trouvé que chez les animaux éveillés les cellules répondant de façon significative par un changement moyen de fréquence dans un cycle respiratoire ? Si nous considérons des intervalles de temps plus courts, il est possible que certaines cellules montrent un changement de fréquence transitoire dans une phase du cycle qui n'apparaîtrait pas dans la moyenne lorsqu'on considère l'ensemble du cycle. Cependant il est difficile d'extraire statistiquement une telle période sur un petit nombre d'essais (cinq pour les souris éveillées) et sans tenir compte du fait que la fréquence de décharge fluctue substantiellement dans les différentes partie du cycle (même dans le cycle de référence). Les neurones peuvent également afficher des changements de fréquence de décharge faibles et transitoires et an-dessous des fluctuations intrinsèques dans le cycle de base. Au niveau de toute la population, ces petits ajustements de fréquence pourraient être détectés et utilisés en aval par les centres cérébraux ainsi que nous le montrons dans notre analyse comme un moyen de prédire l'information sensorielle en utilisant des codes de fréquence durant de longs intervalles d'analyse couvrant la durée de l'inspiration.
Nous ne prétendons surtout pas qu'aucune des cellules MT ne change leur fréquence de décharge pendant la présentation de l'odorant comme cela a pu être observé pour quelques neurones. Que nous n'ayons pas observé de fortes variations de fréquence peut être dû à différentes raisons. D'abord les différentes cellules MT enregistrées dans différentes parties du bulbe olfactif peuvent montrer des profils de réponse différents (nous avons enregistré principalement des cellules dans la partie dorsale). En second lieu le nombre de répétitions par stimulus odorant peut constituer une autre différence. Dans notre étude, nous avons seulement effectué quelques essais par odorant alors que, dans d'autres études, plusieurs centaines d'essais ont été effectués et parfois pendant des tâches comportementales. Faire un petit nombre d'essais peut conduire à sous-estimer le nombre de cellules qui ont changé leur cadence de décharge de façon significative. En augmentant le nombre d'essais, on aurait pu aussi détecter des formes de plasticité à court terme. En outre la réponse des cellules MT chez les animaux engagés dans une tâche comportementale peut être modifiée par les centres de neuromodulateurs. Enfin les concentrations et la nature des substances odorantes utilisées (monomoléculaires ou mélanges) peut être une autre source de variabilité. En effet nous avons constaté que certains neurones présentaient des modifications de leur cadence de décharge lorsque nous utilisions des odorants monomoléculaires à des concentrations plus élevées (données non présentées).
En résumé les cellules MT peuvent montrer des comportements complexes suivant l'odorant présenté. Alors que quelques neurones peuvent montrer des changements de fréquence évidents, une grande fraction de la population peut encore répondre aux stimuli par des changements dans leur calendrier de décharge à l'intérieur du cycle respiratoire. En conclusion, tandis que beaucoup de cellules MT chez les souris éveillées ont d'abord été considérées comme non sensibles et dispersées par l'analyse des fréquences, on s'aperçoit qu'en fait elles répondent aux odorants dans des structures temporelles, contribuant ainsi au codage sensoriel.
Implication pour le codage
On a supposé que les cellules MT pouvaient coder les odeurs en modifiant fortement leur fréquence de décharge mais pour seulement quelques séquences odorantes, ce qui implique que les cellules soient étroitement coordonnées et que le code d'odeur soit dispersé entre elles. Cependant ces études ne prennent pas en considération les neurones dont la fréquence de décharge ne varie pas et qui sont communément considérés comme insensibles, et donc ne comportant pas d'information qui se rapporte à l'identité de l'odorant. Nous avons montré pourtant que ces ensembles de neurones à oscillation invariante peuvent coder l'identité de l'odorant avec une grande précision. En effet nous avons fait la frappante découverte que la population des cellules insensibles (environ 70%) contribuait au code neuronal et que l'activité d'ensemble pouvait être utilisée pour prédire les stimuli présentés. Par conséquent l'analyse effectuée à un niveau cellulaire unique sous-estime le pourcentage de cellules qui peuvent contribuer au transfert des informations sensorielles. Ce résultat met en évidence que déduire le code neuronal en se basant sur le profil de réponse de cellules uniques tend à ne donner qu'une vue partielle de la façon dont l'information sensorielle est traitée.
Alors que les neurones individuels ne changent pas leur décharge de fréquence globale, comment le réseau du bulbe olfactif peut-il coder l'information sensorielle ? Une stratégie consiste à coder l'information sensorielle par synchronie croissante (3) (4)(5). Des études théoriques ont montré que les neurones peuvent coder l'information sensorielle en synchronisant leurs potentiels d'action sans modifier de façon significative leur fréquence de décharge. Des études expérimentales sur le système olfactif des insectes appuient le rôle de la synchronie dans le codage de l'odeur, bien que les neurones qui affichent de fortes variations de fréquence peuvent aussi contribuer à ce codage. Dans notre étude, nous n'avons pas pu évaluer précisément la synchronie entre les neurones à l'échelle de temps d'un pic de fréquence individuel puisque nous avons utilisé un nombre limité d'essais par stimulus. Des expériences futures avec un plus grand nombre d'essais seraient nécessaires pour évaluer plus précisément l'influence de la synchronie pour coder l'information de l'odorant dans les diverses parties du cycle. Bien que les synchronies entre les pics de décharges peuvent être importantes nous proposons un mécanisme de coordination légèrement différent. Nous suggérons que les cellules MT agissent comme des assemblées de cellules transportant l'information sur l'odorant en ajustant finement des séquences de potentiels d'action sur la durée du cycle respiratoire. En conséquence les performances de décodage réalisées par le réseau en aval seraient fortement influencées par la durée de la fenêtre de lecture.
Fenêtre de temps spécifique pour la lecture du code temporel
De quelle façon les réseaux en aval tels qu'ils existent dans le cortex piriforme peuvent-ils lire les informations entrantes ? Comme dans un autre système (15) (16), le décodeur peut avoir besoin d'une référence pour intégrer les informations sensorielles. Évidemment une référence essentielle est le début de la stimulation sensorielle mais d'autres points de référence dans le temps peuvent être nécessaires au réseau de décodage pour maximiser l'information de lecture. Nous avons défini ces fenêtres de lecture optimales pour différentes stratégies de codage. Le code pour lire la fréquence de décharge instantanée conduit à une baisse de performance de prédiction pour les fenêtres d'analyse courte (inférieure à 50 ms) et atteint le niveau du bruit de fond (pour 4 ms). En calculant un nombre de fréquences cumulatif ou un vecteur concaténé (une séquence temporelle), nous avons montré cependant que les deux stratégies de codage conduisent à une augmentation de la prédiction de l'identité odorante à une échelle de temps plus courte que le code de fréquence instantané. Nous avons en outre indiqué que le code concaténé fonctionne mieux dans la première phase du cycle respiratoire, celle qui correspond à la phase d'inspiration. Ce résultat est en accord avec une étude récente qui a montré qu'un modèle concaténé est plus efficace qu'un modèle à fréquence cumulée pour encoder les odorants dans une fenêtre de lecture de 20 à 40 millisecondes chez les rats entraînés à une tâche de discrimination entre deux choix. Notre étude ajoute deux observations importantes aux résultats de cette étude. D'abord chez les souris non entraînées nous avons atteint un grand niveau de prédiction en utilisant des populations de neurones à fréquence de décharge invariante et en utilisant peu d'applications de l'odorant (5 essais contre plusieurs centaines par stimulus). Cette situation se rapproche le plus du comportement olfactif naturel où une odeur est reconnue par des animaux non entraînés et permet d'éviter les remodelages possibles de l'activité après des comportements liés à l'entraînement et des applications répétées de l'odorant. Deuxièmement nous avons mis en évidence une diminution rapide des performance du modèle concaténé près de la limite inférieure de la fenêtre de temps ( moins de 6 ms), fenêtre que nous n'avons pas étudiée. Ce système de codage apparaît devenir trop sensible au bruit et voit ainsi ses performances de prédiction diminuer de façon drastique, alors que celui à fréquence cumulée reste stable et atteint un niveau de performance élevé.. Au-delà des limites de cette fenêtre, la fréquence instantanée ou le code de fréquence cumulée donne de meilleures performances que le code concaténé.. Cependant aucun d'entre eux n'atteint le niveau de performance du code concaténé dans la fenêtre optimale de lecture pendant la phase inspiratoire (80 à 100 ms)
Par conséquent le cortex olfactif peut décoder les signaux en provenance du bulbe olfactif sous forme de trains de potentiels d'action compris dans des fenêtres de 12 à 50 ms.. Cette échelle de lecture particulière permet au système d'atteindre un compromis optimal entre la rapidité et la précision de la reconnaissance de l'odeur, comme ce qu'on observe dans le comportement de l'animal (43).
Il s'en suit que, pour obtenir le compromis optimal entre la précision et et la vitesse que l'on observe au cours du comportement, le cortex olfactif peut décoder les informations en provenance du bulbe olfactif dans des segments de temps successifs de 12 à 50 ms tout en conservant les informations des trains de potentiels précédents.. Il est intéressant de noter que les signaux des synapses en provenance des cellules M/T de différentes unités glomérulaires coïncident avec un pic d'activité des cellules pyramidales du cortex piriforme pendant cette durée particulière.
De plus la durée de la fenêtre du temps de lecture optimal correspond à la durée d'un cycle d'oscillation gamma ou à la durée d'un cycle d'oscillation bêta rapide. Les oscillations gamma sont couramment observées dans le bulbe olfactif et sont considérées comme essentielles pour le traitement de l'odeur.(10),(36),(37),(38),(40),(53),(54),. (55). Ainsi elles peuvent servir pour déterminer un cadre temporel fixe aux trains de potentiels d'action. In vitro, les oscillations gamma améliorent la fiabilité du chronométrage de ces trains, et accroissent la discrimination entre les odeurs. La phase ascendante de l'oscillation semble régler l'activité de décharge et optimiser l'information contenue dans le stimulus(10),(36),(37),(38),(40),(53),(54),(55). Nos résultats fournissent une vue similaire et montrent que l'oscillation gamma peut jouer le rôle de la référence interne pour déterminer la longueur des segments d'activité de décharge dans la population neuronale. Par ailleurs nous avons observé que la variation de la référence interne qui est définie par la phase d'oscillation gamma change aussi l'information qui est contenue dans les trains de potentiels.. Ainsi la phase ascendante du cycle gamma conduit à la discrimination maximale de l'odeur pour le code concaténé. Des travaux récents sur le cortex piriforme ont montré que les neurones pyramidaux sont fixés en phase avec avec les oscillations bêta du potentiel du champ local enregistrés dans le cortex (56). Fait intéressant, différents neurones corticaux préfèrent décharger à des phases différentes de l'oscillation bêta LFP. Il est possible que les variations de la phase préférée puissent correspondre aux capacités différentes des neurones corticaux d'intégrer les paquets de décharge fixés par les différents cycles de l'oscillation gamma dans le bulbe olfactif. Quoi qu'il en soit, la façon dont les décharges des cellules MT sont convoyées au cortex piriforme et intégrées à des fréquences plus larges a encore besoin d'être pleinement comprise. En conclusion nous avons montré qu'une fraction importante des cellules M/T peuvent coder les odorants sans changer leur fréquence globale de décharge. Ces cellules forment des assemblées de cellules coordonnées dans le temps. Nous proposons que les informations sensorielles transportées par ces assemblées soient intégrés à des schémas temporels de décharge qui ne peuvent pas être analysés par le cortex de façon indépendante mais dans des segments de trains de potentiels d'une durée spécifique. Les oscillations gamma peuvent représenter un cadre temporel de référence avantageux
pour déterminer les fragments successifs des trains de potentiels.L'information serait décodée de façon optimale à partir de la séquence totale des segments pendant la période de l'inspiration, offrant ainsi un compromis entre la rapidité et la précision de la discrimination.
Cette traduction a été effectuée à l'aide du traducteur automatique Google. Elle est bien sûr à revoir et à corriger. Toutes propositions seront bienvenues.